Chronique

Le pouvoir des personnages virtuels : le succès de Guerlain et les leçons des échecs de Renault et Prada.

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L’utilisation d'ambassadeurs virtuels est un vecteur media performant pour émerger et faire entendre sa voix de marque, mais qui n’échappe pas aux grandes règles du marketing.

Voici l’analyse de trois stratégies d'ambassadeurs virtuels.

La Petite Robe Noire de Guerlain.

La petite robe noire est devenue une icône du vestiaire féminin dès les années 20/30, lorsque les femmes ont commencé à exprimer leur indépendance et leur désir d'une mode plus pratique et confortable. Lorsque Delphine Jelk, parfumeuse chez Guerlain, créé en 2007 une nouvelle fragrance destinée à conquérir la jeune génération de femmes et à rivaliser avec des parfums tels que Coco Mademoiselle de Chanel ou Miss Dior de Christian Dior, c'est Ann Caroline Praza, alors directrice marketing de la maison Guerlain, qui trouve le nom La Petite Robe Noire. Un nom en parfaite adéquation pour représenter les valeurs d’émancipation, de sophistication et d'élégance de Guerlain. Des valeurs incarnées par une mascotte virtuelle, une simple silhouette, qui humanise cette nouvelle marque en créant une image authentique et positive, tout en facilitant l'identification des clients.

La réussite de la silhouette La Petite Robe Noire de Guerlain se résume en quelques points :

  • Création d'un lien émotionnel : le personnage a permis de créer un lien émotionnel durable avec les clients en générant de la sympathie avec une identification simple, attrayante, ludique et transgénérationnelle.
  • Différenciation de la concurrence : le personnage bouscule les codes de son segment de marché et raconte une histoire sans cesse renouvelée. En effet, le personnage n’assujettit pas la marque à l’image d’une personne réelle et facilite une prise de parole unique et à l’infini.

Liv pour le Kadjar de Renault.

Liv est le nom de l'ambassadrice virtuelle de Renault qui a accompagné le lancement de son modèle SUV Kadjar. Ce personnage aux traits humains réalistes a été choisi pour créer la surprise et capter l’attention mais personne n’y a rien compris ! Pourquoi un tel échec ?

  • Manque d'attrait visuel : l'apparence de Liv n'a pas suscité suffisamment d'attrait visuel car, pour une grande partie de l’audience, il s’agissait d’une personne humaine légèrement floutée. La marque a échoué dans sa tentative d'approche créative réaliste de l'imagerie virtuelle.
  • Communication inefficace : l'utilisation de Liv en tant qu'ambassadrice virtuelle n'a pas été perçue comme ayant une réelle valeur. Le message qui justifiait sa présence a été perçu comme philosophique et trop ambigu : "qui mieux qu’une ambassadrice virtuelle pour se sentir réelle au volant du Kadjar et témoigner de l’authenticité de l’expérience vécue."
  • Incohérence de la personnalité : Liv a enfin donné l'impression d’être arrivée tel "un cheveu sur la soupe". Renault a semblé vouloir simplement surfer sur la tendance des personnages numériques, sans apporter une réelle réflexion sur le sens ou l’histoire à donner à son personnage.

Candy pour Prada.

À son tour, Prada a choisi d’incarner l’image de son célèbre parfum Candy avec une égérie virtuelle, du même nom, aux yeux violets, assumant son côté numérique. Dix ans auparavant, à son lancement, c’est le côté ange et démon de Léa Seydoux qui avait été mis en scène pour représenter la fragrance Candy. Une "Léa Seydoux" remplacée par une "Candy virtuelle", là aussi, le succès n’a pas été au rendez-vous.

  • Absence de connexion émotionnelle : malgré sa description "douce et sensuelle, audacieuse et impertinente", Candy n'a pas réussi à établir une véritable connexion émotionnelle avec les utilisateurs. En raison de son manque de personnalité distincte, elle est apparue fade et peu mémorable, ce qui ne lui a pas permis de susciter des émotions positives.
  • Incompatibilité avec la marque ou le produit : Candy n'était pas suffisamment en adéquation avec l'histoire de la marque qu’elle représente. Les consommateurs recherchent souvent des marques qui ont une histoire et une identité cohérentes. Lorsqu'une mascotte ou un personnage virtuel est utilisé pour représenter une marque, il est essentiel qu'il soit enraciné dans l'histoire, l'esthétique et les valeurs de la marque. Cela permet aux consommateurs de se sentir en phase avec l'univers de la marque et de s'identifier davantage à celle-ci.

 

Ce qu’il faut en retenir :

Les personnages virtuels sont des ambassadeurs de marque puissants et efficaces, à condition qu'ils soient créés de façon organique, c’est à dire avec cohérence et authenticité par rapport à l'identité et aux valeurs de la marque.

Cependant, l'utilisation de personnages virtuels va bien au-delà de la simple promotion de produits et de services. Les personnages virtuels sont aussi des vecteurs de communication très efficaces pour transmettre des valeurs de manière ludique, engageante et inclusive. Les marques ont tout intérêt à explorer les possibilités offertes par ces nouveaux médias pour transmettre une communication de valeurs auprès de générations qui fonctionnent à l’émotion et au sens.

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