L’art, le luxe et l’IA
Publié le par Anne-Laure Colcy
Hier matin, j’avais rendez-vous avec un marchand d’art. Un homme qui, au soir de sa carrière, a vu en quelques décennies son métier basculer, se transformer, et – disons-le – se faire sévèrement bousculer par la technologie… Et il en parle sans nostalgie, mais avec fascination.
Quand il a commencé, être marchand d’art, c’était avant tout deux choses : authentifier une œuvre et déterminer son prix. Un savoir-faire artisanal, une expertise patiemment acquise, une sensibilité aux détails imperceptibles pour le commun des mortels, de longues études théoriques, encore plus d’heures d’apprentissage empirique... Mais ce qui faisait autrefois sa valeur, la technologie l’a peu à peu absorbé, jusqu’à s’en emparer totalement – avec plus de justesse et d'efficacité.
L’authentification ?
Autrefois fondée sur l’œil, le savoir, l’expérience. Aujourd’hui, l’IA et l’analyse scientifique (résonance magnétique, spectroscopie, data forensics…) sont devenues imbattables. Plus rapides, plus précises, inflexibles face aux erreurs humaines.
La fixation des prix ?
Autrefois une science occulte, réservée aux initiés capables de lire le marché comme une partie d’échecs. Aujourd’hui, des plateformes digitalisées croisent des milliers de données transactionnelles, projettent les tendances, évaluent les risques spéculatifs et anticipent l’évolution des cotes avec une fiabilité implacable.
Et ce n’est pas tout.
L’IA générative, via des agents conversationnels artistiques, fluidifie les connexions entre acheteurs et vendeurs et accélère encore la désintermédiation. Plus besoin de passer par un expert pour repérer une pépite ou accéder aux bons réseaux : les algorithmes s’en chargent.
Alors, que reste-t-il d’un métier quand ses fondations sont balayées par la tech ?
Cet homme brillant et passionné aurait pu être amer. Il ne l’est pas.
Parce qu’au fond, si le marché a changé, le besoin, lui, est toujours là. Simplement, il a muté. Profondément.
Aujourd’hui, ses clients ne lui demandent plus d’authentifier une œuvre ou d’en fixer le prix. Ils attendent autre chose. Quelque chose que la technologie ne sait pas faire.
Ils veulent son instinct.
Là où il subsiste un doute, là où la machine n’a pas encore de réponse – par exemple, lorsqu’un artiste émerge sans assez de données pour être "analysable".
Ils veulent son goût, son œil, son talent créatif.
Sa capacité unique à sentir si une œuvre trouvera sa place dans un décor, si elle résonnera avec l’âme d’un lieu, si elle racontera la bonne histoire au bon moment. Savoir si, dans le temps et dans l’espace, elle comblera véritablement son propriétaire.
Ils veulent de l’émotion.
Car si la valeur rationnelle d’un tableau est désormais calculable, son impact émotionnel, lui, échappe encore aux algorithmes.
La vraie valeur ne se "commoditise" pas.
Ce marchand d’art est passé d’un rôle de technicien à celui de conseiller, de curateur de désirs, d’architecte d’émotions.
Les tâches analytiques, répétitives et prévisibles continueront à être absorbées par les machines.
Mais ce qui relève de l’intuitif, de la créativité, de l’émotionnel restera profondément humain.
Et c’est là toute la leçon : quand la technologie remplace un métier, elle ne le tue pas – elle le redéfinit.
Elle dessine de nouveaux contours où résident l’intérêt fondamental d’une profession, et parfois même l’essence d’une passion.
Elle concentre le temps de l’Homme sur ce qui constitue la vraie valeur.
Les marchés de l’art et du luxe ont de nombreux points communs.
Longtemps parallèles, en observation réciproque et s’adressant aux mêmes clients, ils se rejoignent aujourd’hui de bien des manières : inspirations, hommages, collaborations… fusions.
À l’heure où l’industrie du luxe s’interroge plus que jamais sur le bon usage des technologies disruptives – et en particulier sur la place de l’IA générative dans son modèle opérationnel – qu’elle observe l’évolution du métier de marchand d’art.
Qu’elle s’en inspire librement pour redéfinir ses métiers, sa valeur, son avenir...
Qu’elle ne craigne rien d’autre que la peur de la technologie elle-même.
Qu’elle s’engage passionnément dans la révolution de l’IA avec la certitude que, dans un univers de rêve, de création et d’émotions, seul l’Homme dessine les lendemains.
Article sponsorisé.